La pandémie de coronavirus a conduit à un phénomène inédit : le confinement de la moitié de l’humanité. Mais les mesures mises en place pour tenter de ralentir la progression du virus ont parfois été impossibles à appliquer et ont eu des conséquences économiques désastreuses pour les plus démunis.
La pandémie de coronavirus n’a épargné aucun continent. Face à cette crise sanitaire, de nombreux pays appliquent encore des mesures de restriction de circulation. Mais dans un monde où plus de 60 % des actifs occupent un emploi informel, et où des millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, quels risques économiques et sociaux ces mesures font-elles courir à ces populations ?
Confinement et économie informelle
Partie de Chine en décembre 2019, l’épidémie de coronavirus a gagné l’Italie, frappant de plein fouet l’Europe, puis les États-Unis, pays qui compte actuellement le plus grand nombre de décès avec plus de 110 514 morts recensés le 8 juin 2020.
Le Covid-19 est encore présent sur tous les continents, et l’inquiétude d’une seconde vague reste vive dans les pays émergents ou en voie de développement. Les cas confirmés restent moins nombreux en Afrique qu’en Europe, mais le système de santé du continent africain ne permet pas, selon le directeur du Centre africain de prévention et de lutte contre les maladies (CDC) de l’Union africaine, « de répondre médicalement à un afflux de cas graves comme en Asie, en Europe ou aux États-Unis ».
La Somalie et le Burkina Faso compteraient chacun 15 lits de réanimation, contre une cinquantaine en République Démocratique du Congo et en Ouganda. Les respirateurs aussi font défaut : le Sénégal en aurait 80, le Mali un peu plus de 50 et la République centrafricaine, le Togo et le Niger en possèderaient respectivement 3, 4 et 5. Les faibles stocks de médicaments et les difficultés de réapprovisionnement via des solutions isothermes adaptées sont également un défi pour le continent.
Mais la fragilité des infrastructures sanitaires n’est pas la seule menace qui pèse sur les pays émergents ou en voie de développement. Selon un rapport de l’Organisation Internationale de la Santé publié en 2018, l’économie informelle emploierait plus 60 % de la population mondiale. Ces emplois informels, la plupart du temps exercés sans contrat ni protection sociale, représenteraient plus de 85 % des emplois exercés en Afrique, plus de 68 % en Asie, dans le Pacifique et dans les États arabes, 40 % sur le continent américain, et 20 % en Europe et en Asie centrale. Les travailleurs occupant ces emplois informels sont impactés de plein fouet par les mesures de confinement et de restrictions prises par de nombreux gouvernements pour tenter de contenir l’épidémie. À l’heure du déconfinement progressif, l’instabilité persiste.
Subvenir à ses besoins, quoi qu’il en coûte
Contraints à rester chez eux pour respecter ces mesures, des millions de travailleurs précaires ne réussissent plus à subvenir aux besoins élémentaires de leurs familles. Malgré l’appel du Fonds Monétaire International (FMI) qui a demandé à tous les pays d’« accorder une aide considérable aux personnes et aux entreprises les plus touchées, y compris dans les secteurs informels les plus difficiles d’accès », la réalité est souvent bien différente.
En Afrique du Sud, pays qui possède pourtant l’économie la plus développée du pays, rien n’a été proposé aux 25 à 30 % des actifs qui occupent un emploi informel. Avant le début de l’épidémie de coronavirus, l’Afrique du Sud était déjà en récession, avec un taux de chômage avoisinant les 30 %. Au Nigéria, les aides publiques parviennent rarement aux plus démunis, 60 % des habitants ne possédant ni compte bancaire ni possibilité technique de réaliser des transferts d’argent. Au Maroc, une indemnité de 185 euros par mois a été versée aux travailleurs dont l’entreprise a dû cesser toute activité, mais cette aide ne concerne que les salariés affiliés à la Sécurité sociale et exclut les personnes qui occupent un emploi informel, soit près de 80 % des actifs.
Pour tous les employés du secteur informel à travers le monde, il n’y a donc guère d’autre solution que de transgresser les règles sanitaires pour continuer à se nourrir, au risque de s’exposer d’une part à la maladie, d’autre part à des sanctions parfois lourdes.
La question de l’habitat insalubre, des campements roms aux favelas du Brésil
Dans certaines régions du monde, les plus démunis sont encore confrontés à un confinement quasi impossible à respecter en raison d’un habitat insalubre.
En France, les campements roms, qui réunissent en tout 19 000 personnes, ont subi à la fois la faim et l’impossibilité d’appliquer les gestes barrière, notamment le lavage des mains : 80 % de ces campements n’ont aucun accès à l’eau courante. Difficile aussi de déceler les symptômes de la maladie lorsqu’aucune information n’est disponible dans la langue de ces populations.
Le problème de l’accès à l’eau, à l’électricité et la question de l’insalubrité des logements et du manque de médecins se pose aussi à Mayotte, département français de l’Océan indien, où les habitants entrent dans la phase 2 du déconfinement. Problème : 82 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, 40 % des habitations sont en tôle et un tiers ne dispose pas d’un accès à l’eau courante. Dans les bidonvilles, la température à l’intérieur des logements avoisine les 45 °C et la promiscuité est propice à la transmission du virus.
Au Brésil, ce sont 11 millions d’habitants qui vivent dans des favelas, et 31 millions d’habitants n’ont pas accès à l’eau courante. Alors que le Président Jair Bolsonaro avait comparé le coronavirus à une « petite grippe » et invitait la population à suivre une journée de jeûne religieux pour « délivrer le Brésil du mal », les associations ont multiplié les initiatives pour venir en aide aux plus démunis. Livraisons de colis alimentaires et de kits d’hygiène, camions-citernes pour fournir les favelas en eau : les bénévoles sont toujours sur le terrain chaque jour. Et quand les pouvoirs publics ne le font pas, ce sont les trafiquants qui imposent aux habitants un couvre-feu pour respecter les mesures de restrictions.
Si la pandémie de Covid-19 a parfois renforcé les solidarités, force est de constater qu’elle a aussi considérablement creusé les inégalités.
Touche à tout, j’ai exercé de nombreux métiers dans ma carrière. Depuis peu, je suis membre actif de plusieurs associations et je m’exerce à l’écriture via ce site et un journal local dans ma région.