Installée à Sarajevo, la Commission internationale des personnes disparues (ICMP) écume les charniers de la guerre depuis 1996. Objectif : identifier les ossements des victimes, à l’aide de leur ADN. Une mission nécessaire au travail de justice et de réconciliation en ex-Yougoslavie.
Un travail de mémoire au microscope. Depuis ses locaux au centre de Sarajevo, la Commission internationale des personnes disparues relie la science et les droits de l’homme : d’un côté, un laboratoire pour les identifications des corps à l’aide de l’ADN, de l’autre, des bureaux pour traiter des questions juridiques.
« En Bosnie-Herzégovine, une loi donne les mêmes droits à une veuve et à une femme qui prouve que son mari est un disparu », explique Christian Jennings, de l’ICMP. Ce qui passe par une demande d’identification à l’institut. Un échantillon de sang est prélevé sur le doigt des mères, pères, frères, sœurs et autres cousins. De l’ADN est extrait de chaque échantillon, à rapprocher de ceux retrouvés sur les corps dans les charniers.
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Fémur ou tibia
Un processus morbide. « On prend un os de disparu, de préférence long et plutôt dur, type fémur ou tibia. On en découpe une petite partie, transformée en poudre, dont on extrait l’ADN », explique Sylvain Amory, responsable de la recherche et du développement à l’ICMP. Cette tâche demande une minutie immense. Il faut se couvrir de vêtements spéciaux de la tête au pied. « Le moindre postillon ou contact de la peau sur un ossement peut tout changer, car l’analyse détecte l’ADN le plus récent », précise le chercheur.
La correspondance entre les profils ADN des familles et des disparus n’est pas automatique : « En dessous de 99,5% de probabilité, on considère que ce n’est pas assez sûr pour établir le lien de parenté », ajoute Sylvain Amory. Un travail de titan : plus de 90 000 échantillons de référence ont été collectés, 40 000 profils générés, 15 000 identifiés.
Multiples charniers
L’ICMP affirme pouvoir identifier jusqu’à 105 cas par jour. Mais ce n’est pas toujours faisable : l’ADN ne se conserve pas forcément bien avec les années. Du coup, certains ossements ne permettent pas de générer de profil.
Autre problème en Bosnie-Herzégovine, la multiplication des charniers. Pour effacer les preuves des massacres, notamment après Srebrenica, l’armée serbe de Bosnie a déplacé des corps. Conséquence, les ossements d’une même personne peut avoir été dispersés dans plusieurs charniers. Et cela peut modifier le profil ADN.
Puzzle morbide
Par son activité, l’ICMP facilite le travail de deuil des familles. Un travail qui ne peut s’effectuer en l’absence des restes des disparus. « Pour certaines familles, avoir retrouvé le crâne est capital, d’autres peuvent tolérer qu’on enterre avec 20% ou 30% des ossements regroupés. Tout dépend des demandes des familles, de leur religion », explique Christian Jennings.
L’ICMP n’en a pas fini avec son puzzle morbide. A Srebrenica, sur les 8372 disparus, seuls 3000 ont été enterrés. Dans toute la Bosnie, l’ICMP a travaillé sur près de 1 000 charniers. Il y en a peut-être plus. Elle œuvre aussi dans d’autres pays, par exemple en Colombie et au Rwanda. Et contribue, ainsi, à panser les plaies de la guerre.
Touche à tout, j’ai exercé de nombreux métiers dans ma carrière. Depuis peu, je suis membre actif de plusieurs associations et je m’exerce à l’écriture via ce site et un journal local dans ma région.