5 x 2 de François Ozon

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La crise conjugale est dans l’air du temps. Comme un coup de couteau dans l’eau, Ozon travaille à la redite pour livrer un opus formellement assagi mais tournant désespérément à vide.

Dans la lignée

François Ozon n’en est pas à son coup d’essai. Déjà, le maniérisme glacial de « Gouttes d’eau sur pierres brûlantes » exaspérait. Puis « Sous le sable », tenu de bout en bout par l’interprétation fantomatique de Rampling. 5×2 fait d’abord parler de lui en proposant un postulat de départ tape à l’œil : un scénario à rebours. Suffisant à priori pour rendre l’objet intéressant. A partir de ce dispositif, Ozon propose somme toute une vision déprimante parce que banale du couple Freiss-Tedeschi, insistant sur la nature autodestructrice du processus.

Ce qui est très vite agaçant, c’est le sentiment d’impuissance face à la lente décomposition d’un couple au sein duquel tous les coups sont permis. Car le spectateur et le cinéaste ont en permanence un temps d’avance sur les acteurs. L’image de la femme et de l’homme n’en ressort pas grandie. Le bât continue à blesser lorsqu’on se rend compte que nous n’avons aucune prise sur la lente agonie du couple, du fait du syndrome scénaristique « retour vers futur ».

Une sorte de prise en otage larvée. La construction du film valide le parti pris d’un discours mêlant fatalisme générationnel et didactisme pesant sur l’impossible épanouissement du couple hétéro lambda. Le vent de la révolte monte à la vision de cet opus, mais le spectateur se heurte à la volonté déterministe de Ozon, trop phallocrate pour bazarder un script plombé.

A la dérive

A ce parti pris dogmatique, le film oppose une mise en scène étonnement académique et pourtant salvatrice. Ozon s’est débarrassé des scories formalistes. Ici, la caméra se fait régulièrement féline. Comme quand elle nous donne à apprécier la sensualité gironde de Tedeschi. Freiss invite son frère homosexuel et son compagnon à dîner.

A l’heure du digestif, la caméra chaloupe autour du visage de Tedeschi, traduisant toute la sensibilité à fleur de peau de l’actrice. Dans un autre registre, est mise à jour la nature profondément démissionnaire de Freiss confronté à la paternité : après l’accouchement de sa femme qu’il esquive de bout en bout, plan fixe accusateur, silencieux et insistant du gaillard grillant une cigarette au volant de sa voiture à la nuit tombée.

Se résume dans cet instant toute la passivité, l’indifférence intellectuelle et sentimentale de ces nouveaux pères émasculés. De manière beaucoup plus prosaïque, on pourrait simplement constater que selon Ozon, l’échec de ce couple s’explique par le fait qu’il est exclusivement construit sur des clichés. Rencontre au Club Med sur un coucher de soleil, mariage au forceps, enfantement non assumé par le père. Les conventions sociales ne nourrissent pas son homme. Mais surtout, Ozon n’est pas le premier à tenter une radiographie du couple en crise, et, avec ses modestes moyens, sa contribution reste insignifiante. Quoi d’autre M. Ozon ?

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